De la Rome impériale à la Rome de la renaissance

Rome est une ville au passé extraordinaire et unique

Fondée, selon la légende en 753 avant Jésus-Christ par Romulus et Remus. Elle va devenir au cours des siècles la capitale, d’un mil- lion d’habitants, d’un empire qui va s’étendre de l’Ecosse à l’Afrique du Nord et de l’Espagne au Proche Orient. A son apogée règne l’empereur Marc Aurèle (121 - 180). 

Rome de christianise du IVe au début du XVe siècle 

La Rome du IVe au VIe siècle 

En 286 l'empereur Dioclétien partage son pouvoir avec un co-empereur, Maximien. En 293 il délègue encore une partie leur pouvoir à deux césars. Ces gouvernants seront appelés les tétrarques. Chacun gouverne depuis une ville différente, une partie de l'empire. Cette forme de gouvernement est très efficace et Rome connaît une période de sécurité aux frontières et de paix durant une 20aine d'années. 

Les rues sont bien entretenues et les réseaux d’aqueducs, au nombre de 11 et leurs dérivations fonctionnent bien. Les thermes de Dioclétiens, de Trajan et de Caracalla, occupent à eux seuls, une 40aines d’hectares, soit la surface d’une ville moyenne de Gaule. 

Après l’abdication de Dioclétien, en l’an 305, se produisent des luttes internes, de sorte qu’il n'y aura plus que deux empereurs : Constantin qui gouverne depuis Constantinople, la partie de l’empire et Maxence, qui gouverne depuis Rome la partie occidentale. Maxence défend la religion traditionnelle en tolérant le christianisme.

Constantin a compris que la communauté chrétienne est devenue une puissance économique dont ne peuvent se passer les prétendants au pouvoir. Il s’allie par opportunisme aux chrétiens. Il combat et se défait de Maxence à la bataille du Pont Milvius, près de Rome, en 312. 

C’est à cette occasion que le Sénat célèbre Constantin en triomphe qui porte son nom à côté du Colisée. Pour cela on réutilise des matériaux d’autres édifices. Cette pratique, largement utilisée par l’Eglise, durera jusqu’en 1870. 

Par l’Edit de Milan de 313, Constantin accorde la liberté de culte aux chrétiens et leurs restitue les biens confisqués. Il fait édifier à Rome des lieux de cultes imposants sur le modèle basilical. Pour ne pas heurter l’aristocratie sénatoriale gardienne des cultes, il fait construire ces basiliques en périphérie, soit très proche des murs de la ville soit au dehors. Les basiliques du Latran et du Sessorium (devenue Santa croce in Gerusalemme) sont construites dans le Palais de l’Impéra- trice Hélène, mère de Constantin. D’autres, telles St Paul ou St Pierre, sont édifiées dans des zones faiblement habitées. D’autres encore sont installées prés des cimetières ou des catacombes, sur les voies d’accès à la ville. Elles sont dotées richement. 

A partir de cette époque, chaque grande ville a son évêque. Il n’y a pas de véritable hiérarchie entre eux. 

Constantin inaugure en 330 le périmètre de sa nouvelle capitale, Constantinople, bâtie sur la ville de Byzance, en associant rituels chrétiens et païens. Il faudra un siècle pour que la ville soit vraiment considérée comme la capitale de l’Empire.

En 380 les organes dirigeants administratifs, économiques et militaires sont transférés à Constantinople. Le Sénat reste à Rome mais n’exerce que des fonctions honorifiques et cérémonielles, comme la légitimation des élections impériales ou l’approbation formelle des lois. L’abandon de la ville par tout ce qui compte, laisse le champ à l’influence de l’évêque de Rome. Désormais se font face l’évêque de Rome, riche de ses terres, et l’aristocratie sénatoriale également très riche et puissante puisqu’elle distribue l’annone, c’est- à-dire le blé. 

Constantin utilise le christianisme pour des raisons politiques 

Le culte des martyrs, très largement exploité par l’Eglise et en particulier celui de St Pierre, provoque les pèlerinages vers Rome ce qui confère une primauté morale, dans le monde chrétien, à la ville et à son évêque. 

En 325 Constantin réunit un concile à Nicée (actuellement Iznik en Turquie) L’empereur avait besoin pour consolider son pouvoir de s’appuyer sur une Eglise unie. Or il y avait de nombreuses dissensions dogmatiques entre chrétiens, notamment celle découlant des conceptions de l’évêque Arius (arianisme : Dieu est divin, son Fils est considéré avant tout comme un être humain mais avec une part de divinité). Arius et ses disciples sont excommuniés ce qui ne met pas fin à l’arianis- me, loin de là ! Dautres décisions doctrinales furent également prises mais aucun des plus hauts dignitaires religieux, les métroplites, n’obtint la prééminence sur les autres. Il faut attendre l’empereur Théodose et le premier concile de Constantinople en 380, pour voir les décisions de Nicée définitivement imposées. 

L’époque de la tolérance est terminée. Elle s’inverse. Les chrétiens, majoritairement présents dans les villes, déclarent païens, les non convertis (païens = pagani car provenant des villages : pagi). En 380 le culte chrétien devient le seul culte officiel de l'Etat. Les autres cultes sont abolis et les temples fermés. Les tensions entre chrétiens et non chrétiens prennent une connotation politique. Ces derniers s’allient aux ariens. En 394 une bataille oppose l’empereur Théodose allié aux chrétiens et les non chrétiens. Théodose l’emporte. C’est la fin des grandes familles païennes. Théodose protège les monuments antiques comme des édifices faisant partie du patrimoine de la ville. Ce faisant il ménage la classe sénatoriale non chrétienne. Mais le temple des vestales est fermé après 12 siècles de fonctionnement. 

Sur les frontières, les invasions germaniques accélèrent l’écroulement des structures de l’Etat et marque le début de la cri- se économique que connaît le commerce dans le bassin de la Méditerranée. 

Les aristocrates cherchent à entrer dans l’Eglise 

Ils cherchent à entrer dans l’église car le pouvoir des évêques se substitue à celui de l’Etat au niveau régional. A Rome, la classe sénatoriale commence à entrer en masse au sein de l’Eglise. Peu à peu l’évêque de Rome revendique la primauté sur les autres patriarches et métropolites, au motif qu’il siège dans la ville où Saint Pierre, l’apôtre auquel le Christ a confié l’Eglise, fut martyrisé et enseveli. Il parvient peu à peu à s’imposer mais le titre de pape, comme chef de la chrétienté, ne devient officiel qu’au VIIIème siècle. 

Vers 390 – 400 se produisent des tremblements de terre qui font s’écrouler une partie des édifices publics : temples, théâtres portiques et même une partie du Colisée. La dé- gradation de la ville s’accentue par l’absence d’entretien. Plusieurs familles sénatoriales partent. La population baisse. Par le jeu des successions, des alliances et des héritages, les domus (maisons et propriétés) sénatoriales) s’étendent de plus en plus. Au cours du IVème siècle le christianisme se romanise, abandonnant ses connotations orientales et la ville se christianise par l’édification de croix et de lieux de culte dans tout l’espace urbain à l’exception du centre monumental. 

1 musee capitolin statue originale marc aurele  musee capitolin. tete statue geante constantin  8 mausolée Thédoric Ravenne   
Statue de Marc Aurèle 
musée Capitolin
 Constantin
musée Capitolin 
 Mausolée de Théodoric
Ravenne
 

En l’an 400, le christianisme a pris symboliquement possession de la ville 

D’anciens mausolées sont transformés en lieux de culte chrétiens comme celui de Constance, fille de Constantin. 

En 395, à la mort de Théodose, l'empire est à nouveau partagé entre ses deux fils, Honorius et Flavius Arcadius. Honorius, empereur d'occident, renforce l’enceinte de la ville en restructurant les murailles. Il restaure plusieurs édifices publics car Rome reste la ville la plus prestigieuse et le berceau de l’empire d’Occident, même si la capitale effective est transférée de Milan à Ravenne, ville mieux protégée. 

Les tribus germaniques multiplient les incursions. Stilicon, général vandale, chef de l’armée romaine, tient tête aux Visigoths d’Alaric. Lorsqu’ils passent la frontière en 408, Stilicon cherche un accord mais Honorius, le suspectant de collusion, le fait assassiner créant la débandade de l’armée. Alaric descend jusqu'à Rome et l’assiège. Le Sénat essaye de négocier et parvient à un accord mais Honorius, qui se trouvait à Ravenne, refuse de le ratifier. La ville est alors prise et livrée au pillage durant 3 jours (24 au 26 août 410). C’est la fin d’un mon- de comme le ressentent les contemporains (écrit de St Augustin notamment). 

Dans la réalité ce sac n’est pas dramatique pour la ville en tant que telle. Les Wisigoths emportent les biens mais laissent les édifices intacts (à part quelques incendies). Les riches sénateurs aristocrates restaurent les dommages. Mais le dom- mage le plus important est la perte du prestige et la fuite de la population qui a des difficultés à être approvisionnée en blé africain ou sicilien. Les habitants passent de 800'000 en l'an 300 à 300'000 en l’an 430.

Le gouvernement de l’Eglise remplace celui de l’Etat 

Les sénateurs restant entrent dans le gouvernement de l’Eglise qui a remplacé celui de l’Etat. Ils organisent des fêtes mais les combats de gladiateurs sont supprimés à la demande des chrétiens qui ne tolèrent pas les mises à mort gratuites (438). 

Les papes sont devenus les plus grands propriétaires terriens du Sud de l’Italie et de la Sicile. Ce sont eux qui assurent maintenant l’anone. Ils construisent des églises dans le centre de Rome. Elles sont de structure basilicale comme pour souligner leur attachement à la culture classique et traditionnelle com- me Santa Maria majeure sur l’Esquilin ou Santa Bibiana. 

En 440 Rome est menacée par les incursions maritimes et fluviales des Vandales qui occupaient le nord de l’Afrique. L’Empereur Valentinien III fait décapiter son général Aetius, le vainqueur des Huns et des Germains. Genséric le Vandale organise un raid naval et parvient sous les murs de la ville le 2 juin 455. Il promet au pape Léon Ier d’éviter les effusions de sang et les incendies et de respecter le droit d’asile dans les basiliques. Il pille alors systématiquement la ville durant 15 jours. 

Le mausolée de Thédoric se trouve à la périphérie de Ravenne. Il a été construit en pierres d’Istrie en 520. Il reçut la dépouille du roi à sa mort en 526. Lors de la prise de Ravenne, en 540, par les troupes byzantines du général Bélissaire, ses restes furent dispersés. 

En 483 un pape issu du camp des sénateurs (Félix III) est élu. Désormais l’Eglise doit prendre ses dis- tances avec la classe sénatoriale qui cherchent à s’approprier les richesses de l’Eglise. Un registre précis du patrimoine et des revenus de l’Eglise de Rome est rédigé pour fixer légalement ce qui lui appartient. 

Le pape Gélase Ier (493-496) revendique la supériorité sur le pouvoir impérial 

En 500 l’Empire d’Occident a éclaté en divers royaumes barbares. Rome n’est plus que le siège du pape ou patriarche de l’Occident chrétien. Le pape Gélase Ier (493- 496) revendique la supériorité sur le pouvoir impérial. 

A cette époque un certain nombre de grands édifices et les murailles de la ville ont été en partie restaurées par Théodoric, roi des goths, maître de l’Italie. Les conditions de vie dans la ville s’améliorent. Mais le nombre d’habitants continue de diminuer pour atteindre les 200'000. La faible densité de la population facilite les changements d’utilisation de nombreux édifices publics. La ville est désormais avant tout chrétienne. 

La culture traditionnelle est toujours vivante, surtout dans les domaines de la rhétorique, la grammaire, le droit et la philosophie. St Augustin va utiliser ces connaissances pour diffuser la foi. L’art de la mosaïque, d’origine byzantine, est mis au service de la religion chrétienne. 

La polarité urbaine entre le Latran et le Vatican se renforce

Le complexe du Latran abrite le Patriarcat, siège officiel du pape, évêque de Rome mais la basilique vaticane construite sur le tombeau de Pierre, légitime le primat du pape sur l’Occident chrétien. 

La ville est divisée en 7 régions ecclésiastiques. Des zones entières, notamment sur les collines, sont abandonnées des habitants. Le pape Félix IV (526 – 530) est le premier à transformer un temple païen en église (Jupiter strator en basilique des saints Cosme et Damien)

La population de Rome tombe à 40'000 habitants

Les guerres entre Byzance et les Goths
pendant les années
535 – 553 est une période difficile pour
Rome. Les aqueducs
sont coupés. L’approvisionnement est difficile. La famine et la peste déciment la population. Les gens meurent ou fuient. La population tombe à 40'000 habitants. Dans le reste de l’Italie la situation n’est guère meilleure. La notion de propriété n’a plus de sens. L’Italie compte à ce moment entre 4 et 5 millions d’habitants. 

En 568 les Lombards entrent en Italie. Ils occupent peu à peu toute la péninsule à l’exception de certaines zones côtières faciles à défendre. Rome est un ilot approvisionné en hommes, armes et nourriture uniquement par voie maritime ou fluviale. 

En 568 les Lombards entrent en Italie. Ils occupent peu à peu toute la péninsule à l’exception de certaines zones côtières faciles à défendre. Rome est un ilot approvisionné en hommes, armes et nourriture uniquement par voie maritime ou fluviale. 

L’aspect de la ville change 

Sous la pression des envahisseurs, les populations du centre de l’Italie refluent vers Rome. La population augmente et atteint vers la fin de VIème siècle environ 100'000 âmes. L’Eglise leur apparaît comme la seule entité capable de les aider. Son prestige augmente. 

Depuis la mort de Théodoric, les monuments sont laissés à l’abandon. Le forum est en ruines. Les thermes sont délaissés car ils représentent le culte du corps abhorré par la religion chrétienne. Il persiste quelques balnea mais sans plus. Les collines du Capitole et du Palatin sont dépeuplées. De larges zones entre les collines sont en 589 le Tibre déborde et les réserves de blé sont détruites. La peste bubonique apparaît. Le pape Pélage II en meurt en 590. Il est remplacé par Grégoire Ier le Grand (590-604), d’origine aristocratique. 

Au VIe siècle l’église détient totalement le pouvoir sur Rome 

Durant le VIème siècle, le Sénat ayant disparu et la classe aristocratique s’étant dispersée, c’est réellement l’Eglise qui détient le pouvoir sur la ville. Elle approvisionne la ville en eau et nourriture, s’occupe des défenses et de l’entretien des édifices administratifs. 

Les églises, couvents et autres institutions religieuses se sont multipliées. Les religieux représentent 10% des habitants de la ville. Avec Grégoire le Grandla ville antique disparaît et la ville chrétienne naît. La population mélangée par l’afflux de gens de toute l’Italie a perdu ses racines antiques. 

Pendant le VIème siècle la ville a subi des envahisseurs, des inondations, des épidémies et des famines. La culture est passée au second plan et il n’y a que peu de productions littéraires ou autres durant cette période. La ville antique disparaît, s’efface sous les alluvions et les décombres. Peu de personnes savent encore déchiffrer ces ruines. 

Télécharger version complète tirée de la Louve à la Tiare de Pierre B.pages 1à 21